Par auteur > Gardenier Matthijs

Surveiller, classer, identifier : le quotidien d'un Voisin Vigilant
Matthijs Gardenier  1, *@  , Sarah Limorte * @
1 : Université Paul Valery Montpellier 3
Université Paul Valery Montpellier 3
* : Auteur correspondant

Cette proposition se fait autour du film Amateurs d'ordre qui entend documenter et interpréter les phénomènes de vigilantisme en France. Il associe Sarah Limorte, réalisatrice et Matthijs Gardenier, Docteur en Sociologie, dans la perspective d'un documentaire de création, au contenu alimenté par les méthodes des sciences sociales.

La présentation va s'axer autour du premier épisode de la série, sur les Voisins Vigilants de Valras-Plage, à proximité de Béziers. Cette communauté est animée par G., cadre commercial à la retraite. Nous nous apercevons rapidement que la surveillance qui découle de l'action des Voisins Vigilants, et surtout de son référent, va mettre en place un processus d'identification et de classement.

L'objectif est d'identifier ceux qui « sont du quartier » et ceux qui n'en sont pas, à surveiller car potentiellement criminogènes. Nous y voyons une dynamique de « peur dérivative » telle que l'a définie Sygmunt Bauman, c'est-à-dire «une peur générale vis-à-vis de vagues dangers qui grouilleraient juste hors de vue»[1]. Cette surveillance de tous les instants, et l'acte de classement qui en découle va poser in fine la question de la communauté de quartier et de sa délimitation : qui va y appartenir ou pas. Nous y retrouvons une logique schmittienne, liée à la pensée de Carl Schmitt qui ne conçoit l'existence de la communauté politique qu'à l'aune de la figure de l'ennemi, qui rend possible l'affirmation du « nous », face au« eux »[2]

C'est alorsla recherche de celui qui est étranger au quartier et donc potentiellement délinquant qui va permettre créer une communauté à partir de l'acte de l'identification. Pour autant, est-il réellement possible de générer du lien social uniquement à partir de la figure de l'ennemi ? Qu'en est-il de ceux qui refusent d'appartenir au groupe des Voisins Vigilants ?

En matière documentaire et sociologique, nous avons choisi une approche hybride entre l'entretien semi — directif et la démarche ethnographique. À partir d'un premier entretien, nous avons suivi G. plusieurs après-midis, avec d'autres Voisins Vigilants, jusqu'à être suffisamment en confiance pour aller patrouiller ensemble. Finalement, c'est toute une subjectivité du vigilantisme qui apparait et qui permet d'interroger le rapport qu'entretiennent ces Voisins à la communauté. Par ailleurs, nous allons comprendre comment très rapidement, la recréation du lien social devient pour certains un moyen d'accumuler du capital social.

[1] Bauman, Z., Le Présent liquide. Peurs sociales et obsession sécuritaire, Le Seuil, Paris, 2007, 144 p

[2] C. Schmitt, J. Freund et M-L. Steinhauser, La notion de politique : Théorie du partisanEditions Flammarion, Paris, 2009.



  • Poster
Personnes connectées : 34