Par auteur > Louveau De La Guigneraye Christine

Sociologie filmique, classes sociales, marqueurs sociaux et prénotions des spectateurs
Christine Louveau De La Guigneraye  1@  
1 : Centre Pierre Naville  (CPN)  -  Site web
Université d'Évry-Val-d'Essonne
UFR de Sciences de l\'Homme et de la Société 2 rue du Facteur Cheval 91000 EVRY -  France

L'image donne une vision directe des attributs d'une classe sociale. Le théâtre, la fiction jouent de ces attributs depuis des siècles, que les intentions soient socialement militantes ou comiques.

Avec la question des classes sociales, la sociologie filmique se confronte à plusieurs enjeux. Comment faire pour que les représentations sociales ne dominent pas le propos des personnes filmées ? Comment faire pour que leurs logiques, leurs questionnements, ne soient pas rapidement cataloguées par le spectateur dans des catégories qu'il croit connaître par des expériences antérieures ? Comment faire pour que la parole de personnes souvent dévalorisées par une esthétique dominante ne soit pas niée ?

En anthropologie visuelle, en particulier dans les films qui ont longtemps dominé, la distanciation exotique ne permettait pas de distinguer les subtilités de hiérarchie sociale des personnes filmées. Dans son Essai sur l'Exotisme (1986), Victor Segalen a développé les questions de l'exotisme géographique et de l'exotisme historique. Michel de Certeau, dans « La Beauté du mort » (1990) a montré combien il fallait que la force de certaines classes sociales ait été vaincue pour que ses attributs constituent un objet d'étude pertinent. Aussi, les images d'archives et les images exotiques sont peu l'objet d'un rejet social venu du spectateur.

Les films réalisés « ici et maintenant » échappent plus difficilement à cette distanciation. Parmi nos étudiants, nombreux sont ceux qui s'intéressent aux marges, volontaires ou subies. Dans ces cas, le spectateur fait face à une altérité qu'il découvre ou qui suscite une compassion. A l'inverse, face à des films traitant du quotidien de classes populaires, un jugement, des rires sont fréquents, au détriment des personnes filmées et du propos.

Pour toucher les spectateurs, les faire entrer dans la complexité des situations, de tels films devraient-ils porter d'emblée une déconstruction des prénotions des spectateurs ? L'esthétique filmique peut-elle nous aider à participer à cette déconstruction ? La volonté d'une déconstruction est-elle finalement le signe de la domination d'un jugement social dominant sur le sociologue réalisateur ?

Cette intervention s'appuiera sur des extraits de films personnels et empruntés à d'autres réalisateurs.

CERTEAU, Michel de et GIARD, Luce, 1990. L'Invention du quotidien. 1, 1,. Paris : Gallimard.
SEGALEN, Victor, 1986. Essai sur l'exotisme: une esthétique du divers ; et Textes sur Gauguin et l'Océanie. Paris : Livre de poche.


Personnes connectées : 37